6. Ces fous de profs de mon conservatoire à moi, Fabienne Gozlan, promotion 1983.


BD Prof de dramaturgie :

Nous allons, n’est ce pas, aujourd’hui, travailler sur la dramaturgie de “La ronde”, scène de séduction s’il en est, n’est-ce pas?…(il ouvre un cahier) Devant vos airs ahuris, je me demandais , n’est-ce pas, si j’avais fait une erreur, mais j’ouvre mon cahier, et que vois-je écrit au programme d’aujourd’hui: “La ronde” d’Arthur Schnitzler.

Vous savez que vous pouvez, à tout moment, consulter mon cahier qui est à votre disposition?! Donc, nous avions, sur la même scène: La bonne et le jeune homme de bonne famille, je lis, voyez vous, c’est écrit là, dans mon cahier, je ne l’invente pas: Sylviane et Laurent, Élisabeth et Daniel et enfin…Géraldine et Clotilde…

Géraldine et Clotilde, c’est déjà un parti dramaturgique fort, n’est-ce pas.

Voyons.

Sylviane et Laurent?… vous avez travaillé la scène grosso-modo…. Eh bien, n’est-ce pas, voyons ce grosso-modo là! …..Vous devez aller chercher vos accessoires? Bien…

nous allons donc commencer par le couple: Élisabeth-Daniel.

Pas d’accessoires? Bien.

Pas de lumière non plus? Pour l’ambiance? Bien…

Nous n’y voyons pas grand chose… mais pourquoi pas, je suis prêt à toutes les expériences dramatur….qui est tombé…quelqu’un est tombé, j’ai entendu quelqu’un tomber… ah, c’est vous? Et ça fait partie de la scène?…intéressant intéressant…poursuivez…

(il s’endort et se met à ronfloter… la lumière se fait, ce qui le réveille. Et il a l’air immédiatement très intéressé. Un temps.)

La scène est terminée? C’était très intéressant.

Ce parti-pris, socialement, se tient. Il est évident que la Bonne ne peut fait l’Acte que dans le noir et que le Jeune homme de bonne famille réalise là un fantasme donc, cela préserve la part du rêve.

Je pense que j’ai un peu, peut-être , somnolé et c’est pour moi, voyez vous, un critère de qualité. N’est-ce pas, la digestion, l’obscurité…. lorsque je somnole, c’est que je suis bien.

Ah, voilà, Sylviane et Laurent qui nous apportent de nombreux ô combien nombreux accessoires.

Et quels accessoires!! Où avez-vous trouvé cela? Incroyable…

Oh! Le parti est fort, assurément, et ces porte-jarretelles vous vont fort bien, Sylviane.

Allons-y allons-y…

(Il regarde la scène et passe par divers états)

Vous poussez le bouchon un peu loin, mes chers amis, mais ça a le mérite d’être clair.

De plus, n’est-ce pas, je trouve très intéressante l’idée que cette jeune bonne , avec ses “quelque argent”, s’achète des dessous affriolants et que ce jeune homme de bonne famille, revêtu de cuir, soit en réaction totale à son milieu, n’est-ce pas?!

Cependant, il me semble que vous vous éloignez du texte un petit peu trop.

Je souhaiterais voir, n’est-ce pas, si ce parti pris ne peut pas prendre davantage appui sur le texte. Scène à revoir. Certainement.

Je la note…sur mon cahier.

Géraldine et Clotilde? Vous n’avez pas pu travailler? Géraldine, toujours vos insomnies? Oui? Alors vous marchez dans les rues? Et le matin vous n’arrivez pas à vous réveiller?..

Je vous note également pour la semaine prochaine. Pensez bien à cela: les données dramaturgiques sont: une Bonne, et nous pouvons dire, n’est-ce pas, qu’il s’agit d’une bonne, d’une femme au service de la famille, au service, n’est-ce pas, et de la famille et quelle famille? Celle du jeune homme de bonne famille. Une famille bonne, donc, une Bonne, et un homme, jeune.

Je ne saurais vous conseiller de lire mon livre “Dramaturgy” (il le dit avec l’accent anglais). Il est écrit en anglais mais je suppose que vous possédez bien la langue de Shakespeare, n’est-ce pas? Le livre vous fera prendre conscience de l’importance du décryptage des données dramaturgiques fournies par l’auteur. Ici prend fin notre cours de dramaturgie.

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