Inventer, rêver, écrire d’autres mondes : ce procédé artistique a toujours permis de s’évader d’un réel décevant sur lequel on aurait peu de prise, pour tenter de reprendre le contrôle dans un ailleurs fantasmé et ouvrir en grand des fenêtres invisibles.
Depuis Aristophane et ses Oiseaux ou, enjambant les siècles, depuis Karel Čapek et son R.U.R., inventeur du mot « robot » (esclave), le théâtre a connu une tradition de science-fiction assez marginale. À l’heure où l’humanité est en péril face à l’urgence climatique, les dramaturges se penchent désormais sur ce genre qui permet le détour politique et métaphysique.
Ainsi Karin Serres, dans Nos fenêtres invisibles et Je suis le contrepoids du monde, chemine avec bonheur du côté de l’utopie et de l’espoir chez les nouvelles générations.
Chez Frédéric Sonntag et son vertigineux D’autres mondes, ce détour passe par la physique quantique : il s’intéresse à la théorie des mondes parallèles pour composer une fiction théâtrale totale.
Le théâtre étant définitivement l’art de l’esquive, ces deux auteur·rices parviennent avec brio à nous détourner d’une réalité trop complexe à appréhender, non pour la refuser, mais bien pour trouver des armes pour la décrypter, et, qui sait, chercher à en changer le cours.
L’invention d’autres mondes scéniques peut aussi naître des dialogues multiples entre les arts de la scène et les arts visuels, explorés dans le dossier du nouveau numéro de Théâtre/Public qui paraît ce printemps.
Belles lectures, prenez soin de vous et du collectif.
L’équipe des éditions Théâtrales