Comédien, metteur en scène, menant d’une présence sûre, une assez jolie carrière au cinéma et à la télévision, il s’est éteint jeudi dernier. Il était né en 1951. Il aurait pu rencontrer encore de grands rôles.

On l’a toujours associé aux belles années Vitez. On le revoit pour toujours dans les Molière, en 1978, d’Avignon à l’Athénée, en passant par le Théâtre de la Porte-Saint-Martin , (ou l’inverse) dans le cadre du festival d’Automne. On l’avait également applaudi dans Ubu roi, plus tard, vers 1985, mais plus encore dans Le Soulier de satin, deux ans plus tard. Il y dessinait plusieurs personnages, mais, allez savoir pourquoi, c’est en Chinois à longue tresse et petit calot noir, qu’on le revoit pour jamais…Il était alors bien loin d’être un débutant. Il avait suivi les cours de l’ENSATT, qui était encore rue Blanche, puis avait intégré le conservatoire.

Il fit partie de ce spectacle très séduisant que fut Le Prince travesti de Marivaux, dans la mise en scène d’un jeune élève, né en 1950, un jeune ténébreux fougueux : Daniel Mesguich. Plus tard, entre les reprises de Molière, joués notamment à Nice, il avait travaillé avec Mehmet Ulusoy, Stuart Seide, puis rencontré Charles Tordjman, avec qui il jouera souvent, puis Jacques Nichet. On est dans les années 90. Il n’arrête jamais. Sa silhouette souple, son regard clair de Pierrot Lunaire, sa densité et sa légèreté, pourtant, font de lui un interprète au spectre très large et moiré.

Daniel Martin pouvait être une quintessence d’Arlequin, mais aussi des personnages bien plus inquiétants. Dans ces années-là, il signe ses premières mises en scène. On n’a pas oublié son Jacob et Joseph de Bruno Schulz. Avec Tordjman, il signe un spectacle consacré à Karl Valentin, partage la création d’une pièce de Wladimir Yordanoff, Droit de retour, fait un bout de chemin avec Michel Didym, Frédéric Bélier-Garcia et croise sans cesse le chemin et les écrits de Serge Valletti. C’est avec Cahin Caha, que l’on découvrit aux Déchargeurs et fut joué en Avignon, encore l’été dernier, que l’on aura revu pour la dernière fois cet artiste profond et nuancé, capable de gravité comme d’irrésisitible drôlerie.

Ne faisons pas ici le détail de tout ce qu’il a interprété. Il fut le co-fondateur de « Rue du Conservatoire », l’association des anciens élèves, et l’on espère que le site permet l’accès à l’ensemble de ce chemin riche et divers.

Daniel Martin tournait pour le cinéma comme pour la télévision depuis ses tout débuts, jusqu’aux dernières années, de même à la télévision. Il possédait une personnalité forte, mais sans aucune agressivité. Il avait l’art de passer avec élégance, sans aucune crispation, jamais, de personnage en personnage, d’univers en univers.